Jadis considérée comme un centre de prospérité, Pétion-Ville ploie aujourd’hui sous le poids d’un exode urbain inédit. Face à l’effondrement sécuritaire de Port-au-Prince et à la montée en puissance de la coalition de gangs Viv Ansanm, cette commune est devenue un point de repli pour des milliers de personnes fuyant la terreur.
Le constat est accablant : la circulation est désormais un cauchemar. Les rues sont saturées de motocyclettes, de véhicules bloqués en file indienne, et de piétons tentant de se frayer un chemin. En fin d’après-midi, parcourir une distance qui nécessitait à peine 15 minutes peut prendre jusqu’à deux heures. À certains endroits, Pétion-Ville ressemble à un gigantesque parking figé sous un soleil accablant.
Dans un post relayé sur les réseaux sociaux, Gazette Haïti illustre ce désastre quotidien, affirmant que « circuler à Pétion-Ville est devenu pratiquement impossible ». Ce phénomène s’explique par la migration soudaine d’une grande partie du transport public et du commerce de Port-au-Prince vers la commune, à la recherche de sécurité.
Les principales voies d’accès à Pétion-Ville, telles que Bourdon, Canapé-Vert et Laboule, sont elles aussi bouchées du matin au soir. Le moindre incident, le plus petit embouteillage, suffit à transformer les artères principales en zones d’immobilisation totale.
Ce bouleversement urbain entraîne des répercussions socio-économiques majeures. Les habitants permanents se retrouvent en concurrence avec les nouveaux arrivants pour les ressources limitées. Les marchés sont saturés, les loyers grimpent, et la tension monte. Les autorités locales, quant à elles, semblent dépassées par l’ampleur de la crise.
Au-delà du trafic, Pétion-Ville est en train de devenir le miroir d’une capitale qui s’effondre. La peur pousse les familles à fuir les zones de non-droit, mais ce déplacement de population ne s’accompagne d’aucune stratégie gouvernementale d’accueil, de décongestion ou de sécurité.
La situation actuelle soulève de nombreuses interrogations : combien de temps la commune pourra-t-elle encore absorber ce flux ? À quel moment cette pression sociale et logistique atteindra-t-elle un point de rupture ?
Il est urgent que l’État haïtien prenne la mesure du danger. La réponse ne peut être uniquement sécuritaire ; elle doit aussi être urbanistique, sociale et économique. Sans un plan d’action concerté pour déconcentrer la ville, renforcer les communes périphériques, et restaurer l’ordre dans la capitale, le risque d’effondrement complet devient plus que probable.
Pour l’instant, Pétion-Ville tente de survivre. Mais à quel prix ?